Vu du front, représenter la Grande Guerre s'intéressera à la
manière dont les contemporains ont perçu et représenté le front. Comment
les combattants ont-ils vu la Grande Guerre? Qu'en ont-ils montré et
pourquoi?
Il s'agira d'abord de rappeler que la peinture, la
photographie ou encore la presse illustrée ont abondamment évoqué le
sujet avant même le début du conflit. Ainsi, les sociétés ont construit
des imaginaires de la guerre où l'héroïsme et le patriotisme militaire
occupent une place essentielle. Mais c'est une réalité toute autre que
découvrent les contemporains en septembre 1914.Tout d'abord, l'absence
d'images du conflit provoque l'invention d'images nouvelles, la
récupération et le recyclage d'images antérieures.
A cette guerre
imaginée, se substitue progressivement le conflit réel, celui perçu par
les millions d'hommes mobilisés et qui parfois ont emporté avec eux leur
carnet de dessin ou leur appareil photographique. Ce contact avec le
combat constituera le second temps de l'exposition. La violence inouïe
du champ de bataille et l'apparition des tranchées conditionnent le
regard. Les hommes donnent à voir une autre guerre, différente de celle
présentée dans les journaux, les illustrés et le cinéma. Les images du
front commencent donc à circuler et les belligérants tentent d'encadrer
la production quand ils ne l'interdisent pas, mettant par ailleurs en
place des missions de peintres ou des services photographiques.
L'installation
de la guerre dans la durée, le sentiment croissant que celle-ci ne
s'achèvera pas de sitôt, et l'attente conduisent les combattants à
représenter les conditions de vie dans les tranchées, la boue, la
chaleur, le froid, l'ennui: autant d'objets pour les artistes,
photographes ou écrivains mobilisés. Cette séquence constituera le
troisième temps de l'exposition. Les nouvelles armes comme l'artillerie
et l'aviation, les nouvelles techniques comme le camouflage et leurs
conséquences sont perçues pour leur dimension esthétique mais aussi vues
comme des témoignages du nouveau pouvoir de la guerre et de la barbarie
de l'ennemi.
L'expérience de la guerre a profondément changé les
sociétés, leur façon de s'affronter et le sens qu'elles ont pu donner au
conflit. Les représentations de la guerre sont aussi diverses que les
expériences elles-mêmes vécues par les artistes. Les expositions,
récits, recueils, publications, albums, films mêlant fiction et réalités
se sont multipliés. Pour autant certains artistes gardent pour eux,
mûrissent longuement ou refoulent leurs impressions de guerre, ne les
livrant qu'à l'issue d'une longue phase de maturation et de décantation.
C'est cette pluralité que l'exposition s'attachera à rendre sensible à
ses visiteurs, en mettant en évidence l'absence d'une représentation
unique du premier conflit mondial.
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